GUIDE du PÈLERIN de SAINT-JACQUES de COMPOSTELLE, CHAPITRE VIII
Corps saints qui reposent sur l'itinéraire de Saint-Jacques (d'Arles) et que les pèlerins doivent visiter.
Tout d'abord ceux qui vont à Saint-Jacques par le chemin de Saint-Gilles doivent rendre visite en Arles au corps du bienheureux Trophime,
confesseur ; c'est lui dont saint Paul, écrivant à Timothée, évoque le souvenir et qui fut, par ce même apôtre,
sacré évêque et envoyé le premier dans cette ville pour y prêcher l'évangile du Christ.
C'est de cette source très claire, dit le pape Zozime, que toute la France reçut les ruisseaux de la foi. Sa fête se
célèbre le 29 décembre.
Il faut visiter aussi le corps du bienheureux Césaire, évêque et martyr, qui établit en cette ville la règle
des monastères et dont on célèbre la fête le 1er novembre.
Et dans le cimetière de la même ville, on doit chercher la protection de
l'évêque saint Honorat dont l'office solennel se célèbre
le 16 janvier. Dans sa vénérable et magnifique basilique
repose le corps du très saint martyr Genès. En effet, il y a un faubourg
près d'Arles, entre les deux bras du Rhône, appelé Tinquetaille,
où se trouve une colonne magnifique de marbre, très haute et
dressée sur la terre derrière l'église de ce saint. Le
bienheureux Genès, dit-on, y fut attaché, puis décapité par la
populace perfide. On y voit encore aujourd'hui les traces rouges de son sang
vermeil. À peine décapité, le saint prit sa tête entre ses mains
et la jeta dans le Rhône. Il confia au fleuve le transport de son corps jusqu'à
la basilique de Saint-Honorat où il gît très honorablement.
Sa tête par contre, suivant le Rhône,
puis la mer, fut conduite par un ange jusqu'à Carthagène en Espagne
où dans la splendeur elle repose et fait de nombreux miracles. Sa fête
se célèbre le 25 août.
Il faudra visiter ensuite, près d'Arles, un cimetière à un
endroit appelé les Aliscamps pour prier suivant la coutume pour les morts
avec prières, psaumes et aumônes. Sa longueur et sa largeur sont d'un mille.
Nulle part ailleurs, on ne peut trouver dans aucun cimetière tant et si grandes
tombes de marbre alignées. Elles portent des décorations sculptées
diverses et des inscriptions latines dont le texte ancien en est inintelligible.
Plus on regarde loin, plus s'allonge la file des sarcophages. Dans ce
cimetière, il y a sept églises. Si dans l'une d'elles, un prêtre
célèbre l'Eucharistie pour les défunts, ou si un laïque
fait dévotement dire la messe pour eux par un prêtre, ou si un clerc
y récite le psautier, il est sûr d'obtenir le jour de la
résurrection dernière auprès de Dieu l'intercession
des pieux défunts qui gisent ici. En effet, ici reposent les corps de
nombreux saints martyrs et confesseurs dont les âmes résident
déjà dans les joies du Paradis. Leur commémoration se
célèbre le lundi après l'octave de Pâques.
Il faut aussi rendre visite avec plein d'égards et attention au corps très
digne du très pieux saint Gilles, confesseur et abbé, car saint Gilles,
célèbre sous toutes les latitudes doit être vénéré
par tous, célébré dignement par tous, aimé par tous,
invoqué par tous et visité par tous.
Après les prophètes et les apôtres, nul parmi les autres
saints n'est aussi digne, aussi saint, aussi glorieux, ni aussi prompt à
porter aide. En effet, c'est lui qui plus vite que les autres saints secourt les
malheureux, les affligés et les angoissés qui l'invoquent. Oh comme il
est beau et profitable de visiter son tombeau ! Le jour même où
quelqu'un aura fait appel à lui avec ferveur, il sera exaucé sans nul doute.
J'ai fait moi-même l'expérience de ce que je dis : J'ai vu jadis
dans sa ville, quelqu'un qui, l'ayant invoqué, put s'échapper, grâce à ce bienheureux confesseur, le jour même,
de la maison d'un cordonnier, un certain Peiro. Cette maison,
très vétuste, s'écroula et fut totalement ruinée.
Qui donc passera le plus de temps auprès de lui ? Qui adorera Dieu dans sa très sainte basilique ?
Qui embrassera le plus son tombeau ?
Qui baisera son vénérable autel ou rédigera l'histoire pieuse de sa vie ?
Un malade enfile la tunique de ce saint et est guéri. Par sa vertu toute puissante, quelqu'un est sauvé de
la morsure d'un serpent et un autre
possédé par le démon se voit délivré. Une mer en tempête se calme.
La fille de Théocrite recouvre une santé
longuement souhaitée. Quelqu'un dont le corps souffre de partout retrouve une santé ardemment désirée.
Une biche, anciennement sauvage, sur son ordre s'apprivoise et le sert. Un monastère dont il devient abbé se
développe. Un énergumène est délivré du démon. Un péché de Charlemagne,
révélé par un ange, est lavé.
Un mort ressuscite. Un estropié retrouve la santé. Deux portes en bois de cyprès où figurait l'image
sculptée des saints apôtres, arrivent de Rome, portées par les flots de la mer jusqu'au port sur le Rhône,
sans nul pilote et par la seule puissance de sa personnalité. J'ai bien peur de mourir avant d'avoir pu rédiger les
récits de ses hauts faits vénérables, si nombreux et si grands...
Tel est le tombeau du bienheureux Gilles, confesseur où repose plein d'honneur son corps vénérable. Qu'ils
rougissent donc de honte les Hongrois qui prétendent posséder son corps ! Qu'ils tremblent de confusion, les moines
de Chamalières qui s'imaginent avoir son corps entier ! Qu'ils tombent en déconfiture les Saint-Séquanais qui se
vantent d'avoir son crâne et de même les Normands du Cotentin qui paradent d'avoir son corps tout entier car
d'aucune manière, comme beaucoup l'affirment, ses ossements sacrés n'ont pu être déplacés d'ici.
En effet, des gens ont essayé jadis d'emporter en fraude un bras très vénérable du bienheureux confesseur hors de sa patrie
gardoise vers de lointains rivages, mais ils n'ont pu, d'aucune façon partir avec lui.
On dit, qu'il y a quatre reliques de corps saints qui n'ont jamais pu être enlevées de
leurs sarcophage. Ce sont, selon de nombreux témoignages, celles de saint Jacques, fils de Zébédée, celles du bienheureux
Martin de Tours, de saint Léonard en Limousin et du bienheureux Gilles, confesseur du Christ.
On raconte que le roi Philippe (Ier ?) de France, essaya de ramener leurs corps sur son territoire mais
il ne réussit pas à les extraire de leurs tombeaux.
Ceux qui vont à Saint-Jacques par le chemin de Toulouse doivent rendre visite aux reliques du bienheureux confesseur Guillaume.
Saint Guillaume était comte, éminent porte-enseigne de la cour du roi Charlemagne, soldat très courageux, expert des choses de guerre.
C'est lui, dit-on, qui par sa vaillance et sa fougue soumit les villes de Nîmes, d'Orange et d'autres encore au pouvoir chrétien.
Il apporta le bois de la croix du Seigneur dans la vallée de Gellone, vallée où il mena la vie d'ermite et où ce
confesseur du Christ repose comblé d'honneurs après une fin toute de dévotion. Sa fête se célèbre le 28 mai.
Sur le même itinéraire, les corps des bienheureux martyrs Tibère, Modeste et Florence sont aussi à visiter.
Au temps de Dioclétien, ils souffrirent divers tourments pour la foi du Christ et finirent en martyrs. Ils reposent en bordure de l'Hérault
dans un très beau tombeau. Leur fête ce célèbre le 10 novembre.
Sur le même chemin, il faut aller visiter le corps très digne du bienheureux Saturnin (ou Sernin), évêque
et martyr qui, fait prisonnier par les païens, fut attaché devant le
Capitole de la ville de Toulouse à des taureaux sauvages et déchaînés. Il fut traîné au long
d'un escalier de pierre sur un bon mille. Sa tête éclata, sa cervelle jaillit et son corps fut mis en pièces. Il rendit
ainsi dignement son âme au Christ. Il fut enseveli dans un bel endroit près de la ville de Toulouse où, en son honneur, une
superbe basilique fut édifiée par les fidèles. Ses chanoines observent la règle de saint Augustin et Dieu y accorde
de multiples grâces. Sa fête se célèbre le 29 novembre.
Traduction non savante !
Latinistes, merci pour vos propositions (savantes et gratuites) de corrections !
L'Association Française des Pèlerins de Saint Jacques de
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