p250, Finisterre

Voyage au ponant, à Saint-Jacques de Galice et Finisterre à travers la France et l'Espagne.

de Domenico Laffi

traduction de José Martinez-Almoyna

De Compostelle à Sainte-Marie du Finisterre... et retour par Padron.

Le lendemain, après avoir confié nos ballots à M. Ercole, nous vint le caprice d'atteindre Sainte-Marie de Finisterre. Je vais raconter brièvement ce voyage pour que, si un pèlerin veut y aller, il sache le chemin.

Nous partîmes bien pourvus de pain et de vin et sortîmes par la porte située au midi, puis nous nous dirigeâmes vers le ponant. Après avoir franchi quelques collines stériles, nous parvînmes à un endroit appelé Ponte Maceira à une distance de trois lieues (18km). D'ici on arrive à un autre bourg qui se nomme Cegua (?) et ensuite Abeleiroas à une lieue et à Monghesu (?), deux lieues. On continue jusqu'à Ponte Olveira et ce sont deux lieues. Nous parvînmes ensuite à un autre village qui se nomme Villa de Cée (Villa de Cese pour Laffi), deux lieues et d'ici à Finisterre deux autres lieues.

Sainte-Marie-de-Finisterre est une petite église qui possède une Sainte image de la B. V. (Bienheureuse Vierge) et aussi un Crucifix miraculeux de la taille d'un homme. Cette église se trouve aux confins de la terre sur un promontoire ou, si on veut, au sommet d'une montagne qui pénètre dans l'océan vers le couchant (voir photo aérienne du cap). Presqu'à la base de ce promontoire, près de la mer, est accrochée cette petite chapelle avec ces deux images de la B. V. et du Crucifix. Au sommet de ce promontoire, il y a une tour ou, comme on dit, un phare que dans la langue d'ici on appelle farol. Elle est faite pour supporter un feu la nuit à son sommet et le jour encore, en cas de besoin. Il est là parce que de toutes les nations qui naviguent sur l'océan, qu'elles proviennent du septentrion ou du ponant, du levant ou du midi, toutes passent et connaissent ce cap ou promontoire. Souvent elles débarquent à terre ces nations infidèles qui habitent dans les royaumes septentrionaux et ceux du couchant ou du midi, des Amériques, la plus vaste des quatre parties du monde, de toutes les nations d'Afrique, au midi et toutes celles des Indes Orientales et d'Asie orientale ; et comme je disais, tous arrivent jusqu'ici et débarquent en provoquant bien des dégâts chez les habitants de ces côtes. Mais, contre semblable racaille, intervient la défense de cette sainte image de Marie et de son Fils très doux. Elles ont fait bien d'autres miracles comme celui-là : un bateau de maures débarquant ici, ils coururent vite vers cette petite église et virent ce Christ. Ils s'en approchèrent en l'injuriant continuellement. L'un d'entre eux, plus téméraire, dégaina son cimeterre, leva le bras pour frapper le Christ. Mais alors que son bras était dressé, il se figea, immobile sur place comme une statue. De ce fait, ses camarades voyant le miracle et reconnaissant leur erreur, supplièrent le Christ de les pardonner, promettant de se faire chrétiens. Il remit l'épée dans son fourreau et, avec ses compagnons, gagna le village proche qui s'appelle, comme je vous ai dit, Cée. Ils se firent baptiser et continuèrent ensuite leur voyage.

Ce bourg a été construit et fortifié de façon fantastique pour pouvoir se protéger des incursions de ces barbares. De nombreuses personnes sont venues y vivre et monter la garde pour que les pèlerins et les habitants de la zone soient en sûreté lors de leurs voyages. Au cas où les bateaux infidèles ou d'autres nations débarqueraient, ils allumeraient le feu de la tour que j'ai dit, en haut du promontoire en faisant des signaux aux villages voisins. Ceux-ci se passeraient l'avis de danger les uns aux autres et, en une heure, tout le Royaume de Galice serait en alerte et accourrait armé vers ce cap pour le défendre. Dans cette petite église, on conserve le souvenir de nombreuses personnes illustres qui parvinrent jusqu'ici.

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Sur le chemin du retour, on peut, comme nous le fîmes, passer par Iria Flavia, ville située à une demi-journée de Compostelle. Elle possède un joli port de mer situé sur l'océan, au midi, et qui maintenant s'appelle Padron. Il s'agit de la ville et du port où on débarqua le corps de l'Apôtre saint Jacques quand il fût amené de Jérusalem en Espagne. Dans ce port, figure une curiosité très intéressante qui consiste en une barque de taille extraordinaire, toute en marbre blanc que ne peuvent déplacer cent paires de bœufs et encore moins un homme. Comme on dit : il ne la bouge pas, même en la poussant de toutes ses forces et des deux mains. On dit que cette barque était celle qui porta le corps de saint Jacques de Jérusalem à la Galice et qu'à l'instant où les disciples en déchargèrent le corps, elle se transforma en marbre, pour que personne ne puisse l'utiliser ou la déplacer d'ici. Elle est presque toujours recouverte par l'eau et on ne la voit que quand la mer descend lors du flux et reflux. C'est ce que nous ont raconté divers espagnols qui nous menèrent de par la ville pour voir les choses les plus importantes de ce bourg.

Après avoir quitté Iria Flavia nous revînmes à Compostelle...


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