Une page d'Albert t'Serstevens sur la Camara Santa d'Oviedo et ses reliques
dans L'Itinéraire espagnol (1933)

L'art roman lui-même et la tendresse que nous lui vouons nous mènent à la Camara Santa de la cathédrale, deux pièces voûtées en plein cintre dont la plus grande est décorée de statues, de chapiteaux, de frises, d'une imagination quasi byzantine...

L'autre salle, humble et pauvrement éclairée, les murs nus, mais bourrée de richesses comme une grenade, renferme un prodigieux capharnaüm de reliques, à convertir par leur sainte multitude le pécheur le plus endurci. Je ne pourrais en donner ici le catalogue dont la seule nomenclature remplirait dix pages de ce volume, et tout le monde n'est pas comme moi curieux de cette paléontologie des couches religieuses. Il y a de tout dans ce bric à brac sacré, depuis les crânes du même saint à tous les âges de sa vie jusqu'au croûton de la Multiplication des pains. Les dévots pourront s'incliner devant les cheveux de la Magdeleine, une savate de saint Pierre, une dent de saint Jacques, des plumes de l'ange Gabriel, et même devant la peau entière de saint Barthélémy. À cette dernière il doit manquer au moins un morceau, car on peut voir dans une église de Trèves le membre viril du même saint. Il est, vrai qu'il pouvait en avoir deux, ce qui doit être bien commode; ça n'a rien d'impossible puisque saint André d'après, le plaisant tableau des reliques mondiales de Ludovic Lalanne, avait dix-sept bras, et saint soixante-trois doigts.

Le gardien de la Camara nous montre enfin, commentaires érudits sur leur provenance, quelques fragments de la vraie Croix sauvés de la vermoulure par des siècles de miracle constant ; une épine de la couronne ; la patène où sainte Véronique recueillit la sueur de Jésus ; la moitié de la baguette de Moïse et une corne de son front  : tout cela, et bien d'autres, garantis sur facture, avec certificats d'origine appuyés de hauts paraphes et de larges sceaux de cire, comme s'il était nécessaire de prouver la parfaite authenticité de ces reliques admises et vénérées par la Foi. Je n'ai jamais douté de celles que j'ai pu contempler dans la sacristie d'Amalfi, près de Salerne  : toute une bibliothèque de crânes rangés sur des rayons, avec une étiquette d'identité sur le front, comme une pièce de titre ; et de si nombreux ossements, côtes, vertèbres, fémurs, péronés, cubitus, clavicules et scapulums, qu'ils pourraient fournir la prothèse de toute une guerre.

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